Le Périgord se divise en quatre secteurs emblématiques, chacun associé à une couleur, une identité, un terroir. Le Périgord Pourpre, au sud, berceau du vignoble de Bergerac ; le Périgord Noir, plantureux de forêts et de bastides ; le Périgord Blanc, éclatant de craie et d’églises médiévales ; le Périgord Vert, tapissé de vallées et d’eaux vives. De ces matières, sont nés des circuits oenotouristiques aussi contrastés que complémentaires.
Selon le CIVRB, le vignoble de Bergerac couvre seul près de 12 000 hectares, regroupe une dizaine d'appellations (dont la moitié en rouge) et environ 800 vignerons indépendants. Cette richesse justifie à elle seule d’y consacrer le détour.
Le Périgord Pourpre est le cœur battant du vin. Ici, les châteaux ponctuent la campagne comme autant de repères dans le temps. Plusieurs itinéraires thématiques s’y croisent, comme la “Route des Vins de Bergerac et Duras”, balisée par le vignoble de Bergerac, sur près de 90 kilomètres d’est en ouest (Office de tourisme de Bergerac). Voici quelques haltes essentielles.
Imposant, perché au-dessus de la vallée de la Dordogne, Monbazillac réunit la force d’un symbole et le charme de l’inattendu. Sa première pierre fut posée en 1550, mais c’est son vin liquoreux, récolté en vendanges tardives, qui a fait sa renommée internationale. Chaque année, quelque 170 000 visiteurs (source : Sud Ouest, 2023) franchissent son portail pour découvrir les caves historiques, le musée, le parcours immersif “Les Secrets de Monbazillac” et les dégustations face au paysage.
Le château de Tiregand, propriété de la famille Saint-Exupéry, incarne l’excellence du Pécharmant, le vin rouge le plus réputé de la région. Sur ses 40 hectares (source : Tiregand), on cultive Merlot, Cabernet et Malbec dans un cadre bucolique.
Entre Saussignac et Monestier, un domaine familial qui conjugue agriculture biologique, accueil chaleureux, ateliers vins et balades dans la vigne. Depuis 2010, pionnier du “slow tourisme”, il propose des randonnées dégustations et des séjours immersifs.
Le Périgord Noir, berceau de la rivière Dordogne, regorge de châteaux, moins connus toutefois pour leur vignoble que pour leur architecture. Mais quelques domaines prospèrent à l’ombre des bastides et villages médiévaux :
Fondé au XVII siècle et rénové selon les principes de la biodynamie, ce vaste domaine près de Saint-Félix-de-Villadeix produit des vins de caractère, salués par la presse spécialisée (La Revue du Vin de France, lajaubertie.com). Il propose des visites approfondies du chai, du parc et des dégustations d’assemblages.
Célèbre pour son apparition dans “Jacquou le Croquant”, ce château Renaissance en restauration (commune de Rouffignac-Saint-Cernin) tutoie la forêt et préserve une rare collection d’outils viticoles anciens. Les alentours évoquent les pratiques agricoles d’antan, entre vignes replantées et fruitiers traditionnels.
Longtemps terre de céréales, le Périgord Blanc voit refleurir de petites initiatives viticoles : micro-domaines plantés de cépages anciens, biodynamie expérimentale, châteaux orientés vers l’agroécologie et l’accueil rural.
Aux portes de Montignac, Tirecul La Gravière signe l’un des vins liquoreux les plus fins de France, maintes fois primé. Pionnier dans la redécouverte du cépage “ondenc”, il a contribué à la renaissance des vins doux naturels dans le secteur (cf. Decanter, 2023).
Adossé à une belle gentilhommière du XVIII, ce château cultive moins de 5 hectares de vignes, tout en animant un projet œno-touristique créatif : ateliers taille, vendanges participatives, expositions artisanales.
Entre Brantôme, Ribérac et Nontron, le Périgord Vert s’illustre moins par la densité de ses domaines que par la diversité de ses paysages et quelques châteaux où la vigne renaît, souvent en bio ou en permaculture.
Proche de Nontron, cette propriété crée la surprise par ses vins nature et son engagement écologique : vignes menées en agroforesterie, zones humides préservées, accueil des visiteurs pour des stages œnologiques ou naturalistes, balades contées dans le parc.
Dressé au bord de la Dronne, ce château Renaissance cultive sur ses rives un petit vignoble replanté dans les années 2000. Il produit un vin de pays rare, “Cuvée du Château”, vendangé à la main et tiré à moins de 5 000 bouteilles par an.
La découverte des châteaux viticoles du Périgord n’est pas qu’une simple visite : elle engage tous les sens, sollicite l’imaginaire et révèle l’âme d’un territoire où le vin n’est qu’un prétexte à tisser du lien.
Le motif du circuit importe autant que la rencontre. Il existe mille façons de parcourir les routes du Périgord, comme il existe mille nuances dans un verre de vin — pourvu que l’on prenne le temps de savourer l’instant et que l’on garde les yeux grands ouverts sur ce patrimoine vivant.